Agnes 2.0

Voili, voilou,

Il va falloir que je sacrifie à la mode du numérique. Il ne suffit plus d’être une bonne professionnelle et de bien faire mon travail, il devient indispensable d’être visible sur internet.

Je faisais, jusques ici, ma mijaurée.

Je traitais cet univers avec dédain et je restais fidèle à mes bonnes vieilles méthodes du monde réel. Celui que je connais depuis toujours: relationnel, confiance interpersonnelle physique, rencontre pour de vrai, serrement de main, tasse de thé, agenda papier et lettre de présentation et accueil sans écran. Du présentiel, quoi. En espérant que mes résultats, simplement, encourageraient les médecins à me recommander à leurs patients. Ce qu’ils font. Mais…

Arrivés chez eux, les patients en question me cherchent sur le net. Histoire de voir combien d’étoiles je vaux.

Et là. Rien.

Et ils vont voir ailleurs, là où il y a de la com, des étoiles et du rêve. Des évaluations aussi.

Et mon chiffre d’affaire baisse, baisse, s’évapore jusqu’à devenir une sorte de nuée de brume dans un désert.

Mes clients guérissent, et les nouveaux ne viennent pas.

Donc, je n’ai pas le choix. Je vais devoir devenir visible sur internet. Avoir une apparence, une image, vendre un truc, raconter un narratif, faire de la com et du marketing. je déteste. Et je déteste ceux qui le font.

Dilemme.

Je ne suis pas de ce monde où tout le monde a une photo retouchée, glamour et lisse. Où tout le monde est beau, jeune et dynamique, drôle, efficace et bienveillant et surtout bien habillé, parfaitement maquillé et à la mode. Où les superlatifs sont devenus la norme et où la simplicité est devenue du « minimalisme design et épuré ».

Je me sens mal dans ces faux-semblants où ce n’est pas le réel qui compte mais l’avis de Bidule ou de Machine qui se permet de juger un truc qu’elle (ou il) ne connait pas mais s’épanche librement sur les réseaux au gré de son émotivité. Je me sens mal dans ce monde où le geste professionnel est vendu aux enchères sur la place publique sans aucun garde fou et aucune compétence. Je me sens mal dans ce monde où tout le monde juge tout le monde sans le moindre recul, en fonction du politiquement correct du moment. On s’indigne, on s’enthousiasme dans un conformisme étroit. On regarde des images, on écoute des influenceurs, on se met en scène, on s’invente, et on ne réfléchis plus. On reprends les mots et les expressions dans le vent (ou je suis ringarde, et alors ?) sans recul, sans réflexions, sans prendre le temps… le temps passe si vite, il s’accélère tellement qu’il faut se faire une idée immédiatement pour cliquer, pour décider, pour consommer. La minute d’après il sera trop tard, il y aura d’autres clics à faire…

Bref, je ne suis pas de cette logique là.

Mais je dois faire comme tout le monde au risque de devenir rien.

Alors. Ben moi, cela ne me gène pas tant que ça de devenir rien dans ce monde de dingue. Un monde qui n’a plus aucun sens. Qui dénie le réel, le temps de vivre, l’espace où vivre, l’interdépendance affectueuse de notre humanité.

Je me rêve dans ma maison, mon jardin avec mes roses, mes poules et mes salades. Écrire avec mon stylo sur mes cahiers au papier doux, des histoires de vies, de poésie et de réflexion. Lire ce que d’autres ont écrit. Accueillir mes amis, partager un moment ou un café, un repas ou un feu de bois, une balade ou un gâteau, des émotions aussi. Faire la cuisine, prendre un bain avec des bulles, m’endormir en regardant les étoiles… (l’option mâle calinant n’est pas au programme en ce moment).

Mais bon, pour tout cela, il me faut des sous, parce qu’il y a quand même des factures. P… de factures, de dettes et de dépenses obligatoires… alors, je dois faire comme tout le monde… et cela m’emmerde !

Voilà.

Bisous

 

1 commentaire à “Agnes 2.0”


  1. 0 bt 19 mar 2022 à 9:25

    On aimerait se mettre en retrait du Monde, mais le Monde est mondialisé, nul coin où se cacher.

    On aimerait un autre Monde, mais le Monde est globalisé, nulle autre alternative.

    Mon frère se fait étoiler ses petits bungalows tropicaux, mini paradis sur Terre. Ou plutôt dé-étoiler. Par un c…on qui n’a jamais été client, mais qui se permet de critiquer. Et comme ce c…on publie beaucoup de critiques, les algorithmes simplistes lui donnent du poids et de la crédibilité.

    Booking.com, en plein confinement, dit à mon frère : « vous devriez baisser vos prix pour vous aligner sur votre concurrence ». Mon frère répond : « quels prix ? aucun de mes concurrents n’a de client, nous sommes en confinement ». Mais sa réponse est tombée dans une poubelle. Booking.com est une société algorithmique.

    Sur Doctolib, nous nous permettons de noter les médecins. « Dr. Spirou est à déconseiller, elle n’a même pas Télé Loisirs dans sa salle d’attente hash-tag #MauvaisMedecin ». Avons-nous étudié pendant 7 ans et 3 ans de spécialisation pour nous permettre de juger un médecin ?

    Que faire ? Peut-être prendre le Système à son propre jeu ? « Je met une seule étoile au Ministre Le Maire, parce qu’il a mis une cravate style 2015. Mais nous sommes en 2022 lol ».

    Époque absurde

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