Il parle.
Elle écoute.
Elle aime bien ce qu’il dit, le son de sa voix, son accent catalan, ses mots en français qu’on dirait inventés dans une sorte de poésie surréaliste. Elle se laisse un peu bercer…
Il est musicien.
Il s’emporte parfois : »La musique, ça s’écoute, ça ne se parle pas! »
C’est vrai, la musique est un langage en soi, quel besoin de la mettre en mots? Mots savants, mots redondants, mots gonflés de leur importance, de leur intelligence vaine, creuse et vaniteuse…
Mots de critiques qui se vengent de la pauvreté de leurs propres dons artistiques pour s’arroger le droit de juger les artistes et l’art, dans un charabia intello.
La musique , c’est pour elle un langage de l’âme, une vibration particulière qui vient à la rencontre de notre propre vibration. Chaque musique a la sienne. Unique et particulière, elle transmet quelque chose de l’âme unique et particulière de celui qui l’a écrite. Et cela raisonne en nous… ou pas. La musique, c’est de l’émotion qui lui tord les tripes, la fait sourire de bonheur ou lui arrache des larmes sans qu’elle comprenne pourquoi. C’est comme ça. c’est tout. Et il n’y a rien à en dire.
Elle doit écrire un article. Mettre des mots là où elle n’en a pas envie, faire semblant, un peu. Cela fait partie de l’exercice. Elle essaie d’être honnête et louvoie en ne faisant que des articles sur lesquels elle n’a pas de doutes. Celui-là, elle va l’écrire avec plaisir.
Il y a chez cet homme une passion joyeuse, une vie puissante, quelque chose qui sonne juste et vrai. Cela fait du bien. Elle oublie un peu l’interview… Elle n’écrit plus.
Elle aime se taire. Apprendre. On a toujours à apprendre des autres…
Dans ce café un peu bruyant, il y a une enclave humaine, amicale. Un île.
Personne ne joue de rôle, personne n’a besoin de faire semblant, d’épater l’autre ou de l’écraser de sa superbe. Ce serait ridicule et je crois bien que cela les ferait rire tous les deux… Ils n’ont rien à prouver, simplement à dire et à écouter, à s’enrichir des paroles de l’autre, à partager.
Parfois une phrase, une remarque raisonne en elle. « Oui, il a raison. » « Tiens, c’est drôle, je pense pareil. »
Qu’il est agréable de se trouver ainsi un frère le temps d’un café, de ne plus être seule… C’est un trésor qu’elle emmène ensuite, lorsqu’ils repartent chacun à leur vie. Elle, dans sa voiture, vers un repas à préparer pour ses enfants qu’elle se dépèche d’aller chercher à l’école, lui, à pied, vers son appartement.
Merci Maestro !
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